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Peuples racines et forêts : que nous apprennent-ils ?

C’est après la lecture du nouveau magazine Natives, premier média en français sur les peuples racines, que j’ai souhaité faire un focus sur ces populations autochtones présents sur les 5 continents. Ils sont plus de 5000 peuples, ce qui représente 370 millions de personnes réparties dans plus de 90 pays. Même s’ils représentent 5% de la population mondiale, ils parlent 4000 des 7000 langues du monde. Ils font actuellement face à de très nombreux défis, notamment liés à la déforestation.

Les forêts du monde couvrent environ 4 milliards d’hectares, représentant 30% de la superficie des terres émergées. Mais 13 millions d’hectares de ces forêts disparaissent chaque année, ce qui est l’équivalent du quart de la superficie de la France. Les principaux responsables sont l’agriculture intensive pour 70%, l’industrie de la pâte à papier, les barrages hydroélectriques, l’exploitation du bois et celle des mines et du pétrole. Les forêts tropicales même si elles ne recouvrent que 7% de la planète, abritent entre 50 à 70% de la biodiversité.

Les rôles des peuples indigènes sont essentiels puisqu’ils en sont les principaux gardiens. Ce sont eux qui ne cessent d’alerter sur la déforestation de l’Amazonie et qui sont conscients que « si l’on détruit la nature, on se détruit nous-mêmes ».

Depuis 1989, c’est le combat du peuple Kayapo au Brésil, qui lutte pour la protection de la forêt amazonienne, ou celui du peuple Kichwa de Sarayaku en Equateur, qui a édifié autour de son territoire une frontière naturelle visible du ciel de plus de 500 km de long, et ce pour obtenir du gouvernement que la forêt soit « considérée comme un être vivant, conscient et sujet de droit ».

De plus en plus d’experts admettent que les peuples autochtones sont le meilleur rempart pour la préservation des forêts et la biodiversité qu’elles recèlent. L’IPBES, la plateforme mondiale sur la biodiversité, est d’ailleurs tout à fait d’accord avec leurs points de vue ; on peut retrouver cette conclusion dans son rapport publié en mai 2019. Citons comme exemple, le Brésil, la Colombie ou la Bolivie qui connaissent un taux de déforestation annuels en moyenne deux à trois fois plus faibles dans les forêts placées sous la responsabilité des autochtones.

Sur notre continent, Francis Hallé, botaniste et spécialiste des forêts tropicales, a été l’initiateur en 2019 d’un projet de forêt primaire de 65 000 ha en Europe de l’Ouest. Il ne faudra pas moins de 6 siècles pour créer cette forêt. « Cette durée semble énorme, mais elle nous est imposée par la forêt elle-même et personne n’est capable d’accélérer le processus » déclare-t-il.

En France, la forêt occupe 17 millions d’hectares, soit 31% du territoire, ce qui paraît assez conséquent mais dans la plupart des cas, ce ne sont pas de vraies forêts, mais des plantations d’arbres, comme la forêt des Landes.

Or forêt et plantations sont d’après le botaniste, deux systèmes différents, voire antagonistes car l’un augmente la diversité biologique alors que l’autre correspond à une entreprise industrielle et commerciale dont la diversité biologique est presque nulle. De fait, « moins la biodiversité est élevée, plus la sensibilité aux parasites, au vent et au feu est importante. Une forêt, au contraire, c’est un écosystème naturel dont la mise en place n’a rien coûté à la société. Elle est constituée de nombreux arbres autochtones d’âges divers, très résistants au vent, au feu et aux parasites. Cet écosystème a une durée de vie illimitée et la biodiversité la plus haute. Mais, bien sûr, au plan économique le rendement est inférieur à celui des plantations d’arbres ».

De plus, l’impact des forêts sur le climat, la biodiversité, la qualité des eaux ainsi que sur notre santé est énorme. Si l’on prend ce dernier cas en exemple, on a constaté que les bains de forêt pris par les Japonais peuvent ralentir le rythme cardiaque, diminuer les hormones de stress mais aussi renforcer les défenses immunitaires au point que quatre heures en forêt correspondent à un mois de bien-être.

Alors n’hésitons plus à faire de longues balades en forêt pour se ressourcer. C’est essentiel !

Mais pour cela, il faut aussi que les arbres soient présents. Des programmes de reforestation existent. Celui de feu l’artiste tuniso-belge Naziha Mestaoui « 1 Heart 1 Tree » allait dans ce sens puisqu’il associait la présentation d’une œuvre d’art numérique à une initiative de reforestation.

Le projet a rencontré un vif succès avec une participation de plus de 1,4 million de personnes et 100 000 arbres plantés, toujours des espèces locales, qui ne sont pas destinés à être coupés ou exploités mais dont l’objectif premier est de régénérer la biodiversité.

Il faut donc que nous prenions conscience que si nous détruisons la nature, l’humanité s’attaque à elle-même et qu’il faut arrêter de penser que les ressources de la Nature sont inépuisables. 

Marco Lambertini, directeur du WWF, va d’ailleurs dans ce sens lorsqu’il déclare : « Il ne peut y avoir de futur sain et prospère pour les hommes sur une planète au climat déstabilisé, aux océans épuisés, aux sols dégradés et aux forêts vidés, une planète dépouillée de sa bio-diversité ». Ce que les Indiens Kogi savent depuis toujours de manière intuitive. C’est pour cette raison qu’ils mettent l’accent sur le bien-être collectif plutôt que sur l’individualisme forcené. Les Hopis, quant à eux, tentent de rester à l’écoute de leur intuition et d’avoir le « chakra couronne » (la « porte au sommet de la tête) bien ouvert, branché sur la perception de l’invisible et l’écoute intuitive du monde (celui du dedans comme le monde du « dehors »).

Ce langage très chamanique croit en une force de vie liée à une intelligence supérieure à la nôtre, où chaque chose est vivante, fourmille de multitudes d’entités et d’interconnexions. Cette guidance dont parle les Hopis demande bien sûr une sensibilité réelle, connectée à l’ensemble car tout est interconnecté : la montagne avec l’arbre, l’arbre avec la source, la source avec la rivière, etc.

La communication avec le vivant est une capacité que nous avons tous et qui est souvent oubliée ou alors bien enfouie en nous. Les peuples racines nous permettent de nous reconnecter à notre véritable nature car ils sont les gardiens d’un savoir ancestral, de notre reliance à la nature depuis la nuit des temps.

Pour cela, à notre échelle, pourquoi ne pas essayer de réaliser le rituel énergétique de l’arbre pour se ressourcer qui est l’un des 22 protocoles proposés par Natacha Calestreme dans son livre intitulé La clé de votre énergie qu’elle a écrit après avoir rencontré des guérisseurs, médiums et chamanes.

Le principe est simple, il suffit de se rendre dans une forêt ou un parc public ou même de rester dans son jardin et de choisir un gros arbre bien droit. On se positionne à quelques mètres et on lui demande mentalement l’autorisation d’approcher. Quand la connexion est établie, on avance et on s’appuie contre son tronc soit de dos ou de face. On demande alors à l’arbre de nous donner de l’énergie. On imagine ensuite que sa sève entre dans notre corps par les pieds et qu’elle y dépose force, douceur, et bienveillance. Lorsqu’on se sent mieux, on peut alors remercier l’arbre.

Alors, à quand cette rencontre ? car même si les peuples racines restent fidèles à une manière de vivre souvent millénaire, au service du collectif et dans le respect de leur environnement de vie, chacun à son niveau peut se sentir mieux tout en prenant conscience de l’importance de ce qui évolue autour de nous. Vivre en harmonie avec le monde qui nous entoure ne serait-il pas par conséquent un bon début ?

Pour terminer sur ce sujet mais poursuivre cette exploration, j’aimerais citer le livre d’Audrey Fella, Femmes chamanes, rencontres initiatiques qui présente le chamanisme au féminin avec les parcours variés de six femmes occidentales qui ont été initiées dans différentes traditions. Grâce à leurs connaissances, ces femmes soignent et guident les autres. Vous pouvez d’ailleurs écouter à ce sujet l’interview qu’a réalisée Anne Ghesquière d’Audrey Fella dans le podcast Metamorphose.

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